A la veille de la réunion du Conseil de sécurité, qui se tiendra ce 28 avril pour renouveler le mandat de la MINURSO, et avant la publication retardée du rapport du Secrétaire général, quel pronostic est-on en mesure de poser ? La visite de Ban Ki Moon dans les camps de réfugiés sahraouis en mars dernier a ouvert de réels espoirs. Ses déclarations tant à Tindouf qu’à Alger ont été sans ambiguïté : autodétermination, Sahara occupé par le Maroc. Les autorités marocaines habituées à la complaisance internationale se sont alors conduites comme des voyous ; elles semblent aujourd’hui en passe de réussir ce nouveau coup de force.
C’est pourtant la première fois qu’un Secrétaire général des Nations unies est à ce point insulté et désavoué, et c’est également la première fois qu’un État partie se désengage aussi brutalement d’une Mission de paix en renvoyant une importante partie des personnels civils (83 personnes) employés pour le maintien de la paix. Le Conseil de sécurité s’est réuni trois fois en mars à ce sujet. Mais son sou- tien au Secrétaire général – qui tient bon sur ses déclarations – n’a pas été à la mesure de la mise en cause d’un responsable de ce rang et donc de l’institution qu’il incarne. Le Conseil s’est plutôt appliqué à « calmer la colère marocaine ». En dépit de l’engagement du Président angolais, les amis du Maroc ont été actifs pour, suivant les déclarations françaises, « rechercher tous les moyens d’apaisement des difficultés entre Maroc et Secrétaire général ». La France avec le Sénégal et l’Égypte ont donc fait en sorte que le Conseil apaise le Maroc et que le Secrétaire général sorte un rapport « technique », c’est-à-dire conforme aux attentes du Maroc. Plus question d’indiquer que le Maroc est la partie responsable du blocage en refusant depuis 4 années toute reprise sérieuse des négociations. Depuis mars, le Secrétaire général a consacré beaucoup de temps au sujet. Les pressions « amicales » n’ont pas manqué, venant, au-delà du Conseil, des États du Golfe et d’Israël, précieux soutiens du royaume. Mais la diplomatie algérienne a été également très présente. C’est un dossier qu’elle prend de plus en plus au sérieux, ne pouvant laisser son voisin le Maroc décider seul de la carte du Maghreb et de la paix dans la région. Les récents entretiens que les deux Ministres des Affaires étrangères français et algérien ont eu en ce début d’avril ont rendu compte publiquement de l’engagement algérien, pressant la France d’équilibrer sa position pour le bien de tous au Maghreb. La rencontre entre responsables algériens et sahraouis au niveau des Premiers ministres souligne également l’importance actuelle des enjeux et la crainte que la fuite en avant de Mohammed VI n’embrase la région. La France enfermée depuis 40 ans dans cette alliance avec le Maroc ne peut continuer à soutenir un pays qui dé e l’ONU et la Communauté internationale, ni à venir à son aide dès que le Makhzen l’appelle en renfort. Le Maroc n’a plus besoin du Sahara pour sauver sa royauté, mais d’éducation, de démocratie et de bon voisinage.
Voilà 40 ans que les Sahraouis et le Front Polisario tiennent bon, font avancer leur droit sans jamais dévier des règles adoptées par la Communauté internationale. N’est-il pas temps de respecter leur droit à l’autodétermination et à l’indépendance ?
Régine Villemont, le 9 avril 2016